J’étais en board meeting cette semaine et on a passé un long moment à parler de la roadmap produit, des sujets à prioriser. Au final, la conversation a pris une tournure libre, intéressante pour l’échange d’idées mais stérile pour la prise de décision. Et lors de nos échanges concomitants avec l’entrepreneur, nous avons abordé le sujet de comment décider…
Il existe de nombreux cas où la décision est facile à prendre parce que les éléments qui la composent sont limités et cette même décision n’est pas en conflit avec d’autres sujets. Mais lorsque l’on parle de prioriser des sujets stratégiques et/ou critique, la tache est souvent plus complexe.
Revenons une seconde sur l’étymologie du mot décider (mon prof de français, dont la prédiction était que j’avais 50% de chance de terminer clochard, se moquerait de cette insertion frauduleuse de ma part…) : Le mot vient de latin decidere pour dire couper, trancher.
Décider, c’est trancher. Trancher, c’est à la fois libérer de l’espace mental et avancer. Pour décider, il faut réunir trois éléments critiques :
Du leadership;
Un framework de décision;
De l’engagement.
Le leadership, c’est ce qui permet de fixer le cap, de donner le rythme, mais aussi d’imposer une certaine direction en accord avec la vision et la mission de l’entreprise; La vision étant l’état idéal futur du monde et de l’entreprise, le pourquoi, l’horizon vers lequel on tend, et la mission étant plus fonctionnelle : ce que nous faisons, pour qui et comment.
Dans le language que j’utilise pour parler d’applications à destination des usagers finaux, je parle souvent de Narrative pour parler de vision et de Primitive pour parler de mission.
Petit aparté sur le sujet, j’avais un prof particulier qui utilisait souvent une méthode toute simple quand il abordait un sujet, le Q3POC. Qui, Quand, Quoi, Pourquoi, Où, Comment. C’est tout bête mais dans beaucoup de situation, ça permettait d’avoir une vue complète rapidement sans laisser de trous. Vous pouvez même l’appliquer quand vous vous faites virer de l’école parce que vous avez publié et vendu un journal satirique dans la cour… Qui : Jean / Quoi : Un journal / Quand : Les dernières semaines / Pourquoi : Pour gagner de l’argent et faire rire les copains / Où : dans la cour de récréation / Comment : édité avec l’ordinateur de mon père, sorti avec son imprimante et distribué dans la cour. Il ne manque rien, on a fait le tour, viré 3 jours. Vous voyez c’est tout simple comme pense bête. Bref… Aparté clos.
La framework de décision, j’en ai publié un dans Human Machine (Que je vous offre en version PDF) , il n’est sans doute pas suffisant et doit s’adapter à votre activité, mais il permet de se poser quelques bonnes questions :
Quel degré d’information ai-je sur les sur/sous-jacents de ma décision ? Si vous prenez Xavier Niel par exemple, il pose toujours plein de questions, c’est cette curiosité qui lui permet de collecter beaucoup d’information et d’avoir suffisamment de substance pour une prise de décision à venir. Une autre anecdote qu’on m’a raconté récemment c’est celle de Steve Jobs qui demande un rapport stratégique à un collaborateur. Lorsqu’il le reçois, il demande à la personne si c’est ce qu’elle peut faire de mieux. Cette dernière retourne alors collecter plus d’information puis revient vers Steve Jobs qui lui pose la même question : est ce le mieux que vous puissiez faire ? Et la personne y retourne… Au bout de plusieurs échanges, le collaborateur répond à Steve Jobs : Oui c’est ce que je peux faire de mieux ! Ce à quoi il répond : Très bien, maintenant je vais le lire. C’est évidemment un cas extrême mais fascinant tout de même. Par ailleurs, ne pas oublier que le degré d’information joue aussi sur notre capacité à estimer la réussite potentielle d’une décision.
Une fois qu’on a conscience du degré d’information collecté, on peut se poser sur l’impact potentiel de la décision. Si l’impact est faible, est ce que ça vaut vraiment le coup ? Quand vous êtes une boite qui fait des milliards, c’est sympa de rajouter des services additionnels, mais si ce n’est pas pour gagner des points de marge significatifs, à quel point est ce que ça sert vraiment la vision et la mission de l’entreprise ?
Ensuite, il faut se poser la question de l’intensité à déployer pour éxécuter une décision. Pensez à la petite flamme sur Snap par exemple qui s’éteint si vous arrêtez de discuter avec vos amis et au contraire s’intensifie dans le cas inverse, c’est tout bête, mais l’instensité pour déployer cette fonctionnalité a été très faible alors que l’impact sur la rétention a été colossale!
Enfin, il y a le sujet de la reversibilité de la décision, et ce n’est pas anodin, parce que certaines décisions à faible intensité peuvent être irreversibles et avoir des impacts collossaux, comme celles des entreprises qui gardent le secret sur des fuites de données par exemple et qui sont révélées plus tard.
Une décision bien prise, c’est une décision appliquée. Et pour que les équipes soient engagées, il n’y a pas de secret, je vous invite à lire the 5 dysfunctions of a team et sa suite, qui expliquent très clairement la pyramide de succès des équipes engagées.
En résumé, la vulnérabilité créée la confiance qui permet de rentrer dans un conflit constructif. C’est comme cela qu’on applique un concept souvent rattaché à Amazon : Disagree & Commit. L’idée est que chacun s’exprime mais que lorsque la décision est prise, malgré les désaccords, tout le monde s’engage ! C’est ce qui permet à chacun d’être responsable vis à vis des autres avec un objectif clair : délivrer du résultat !
Je dis souvent que l’entrepreneur se démarque par ses prises de décision singulières, c’est à dire sa capacité à faire des choix apparemment contre-intuitifs, nouveaux ou en dehors des normes et qui s’avéreront réussis.
Cette singularité ne s’exprime pas comme un coup de génie hasardeux, c’est la rencontre entre vision et bon sens. Je pense que rien n’arrête un entrepreneur avec le leadership adéquate, le bon framework de décision et un engagement partagé de ses équipes.
Bonjour Jean, quand je télécharge le livre Human Machine depuis le lien partagé, le titre du doc est le suivant : EP3_HumanMachine . Est-ce que cela signifie qu'il y a une série en cours ? si oui, je suis preneur des 2 premiers épisodes sur la thématique.
En tout cas, le contenu de l'article "comment décider?" est très cool. cheers.
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